Un chaland de CHENEE

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L'huile ci-dessus, d'un caractère "citadin" tout à fait exceptionnel dans l'oeuvre du paysagiste, est datée de l'année 1918. (collection privée). Edgard D'Hont y présente son port d'attache: la cité de Chênée qui l'a vu naître, passer sa vie et qui accompagnera son décès pour lui confier enfin son dernier coin de repos éternel.

Pour réaliser cette vue plongeante, il a suffi au paysagiste de monter à l'étage de sa villa des Courteaux, de s'installer à sa fenêtre et de faire appel à sa maîtrise coutumière.

Il sera remarqué dans la partie supérieure gauche du tableau les "sinistres" cheminées de l'usine à zinc de la "Vieille montagne" crachant, dans la plus totale indifférence leurs fumées nauséabondes.

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La carte postale ci-contre nous montre la rue des Courteaux prise du bas au contraire de la vision de l'artiste précédemment proposée. La ville D'Hont est située quasi au centre de la carte. Elle se reconnaît à son toit gris à l'architecture assez compliquée.

Cette villa restera ,sans faillir, le point d'attache de l'artiste. Elle subsiste toujours de nos jours sans réelles modifications architecturales. Le propriétaire ayant pris la succession du paysagiste, artiste lui aussi, a fait ajouter à même la façade des représentations colorées de vieux contes enfantins.Le paysagiste ne les a bien sûr pas connues.

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La photo de gauche, prise dans le salon de la villa des Courteaux ,date du temps du bonheur simple. On y découvre la jeune Adèle D'Hont qui prend la pose d'une lectrice attentive. Adèle, de par ses études, marquera toujours un intérêt très vif à l'égard de tout ce qui touche à la culture dans sa plus totale diversité.

La photo de droite nous montre, bien des années plus tard, le peintre et une partie de sa famille posant sur la courette arrière de la villa des Courteaux. De gauche à droite ,nous y découvrons Edgard bien sûr, son épouse Adèle très marquée par la maladie ( elle décèdera deux mois après ce cliché), Laure, l'épouse d'Alfred dit Donato ,le frère aîné du peintre et, en arrière, ses filles, les deux nièces du paysagiste. ( voir la page Alfred alias Donato, le frère)

A l'extrême droite, on remarquera la jolie Germaine qui, sa vie entière, resta fort proche de son parrain Edgard n'hésitant pas à l'inviter souvent à Paris...

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Ce minuscule tableautin, issu d'une collection privée, de facture assez timide, mesurant à peine 22cm sur 13 cm, est sans doute chargé de beaucoup de tendresse.

A son dos, on peut y lire: "en hommage à Hélène D'Hont".Il est plus que probable qu'au vu de sa relative simplicité,

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il représente un endroit précis cher au coeur de la jeune femme en pleine nature ou plus probablement dans un coin précis du jardin de la villa de Chênée. La délicate ,sensible et très artiste nièce d'Edgard D'Hont, l'une des quatre filles de son frère Eugène, comptable installé à Schaerbeek ( avenue Princesse Elisabeth), décèdera de maladie à l'âge de quarante-quatre ans.Elle repose aux côtés de ses oncles et tante au vieux cimetière de Chênée. Elle était venue rejoindre son oncle au décès de sa femme Adèle et avait su s'incorporer sans difficulté à l'univers artistique qui présidait aux lieux. Nous aurons ici la faiblesse de relier la clarté bucolique de ce tableautin à l'ombre du regard de la jeune femme empli à jamais d'une indicible mélancolie...La photo ci-contre nous présente le peintre et sa nièce, déjà très affaiblie et ayant dès lors perdu de sa beauté et de cette grâce qui, en d'autres temps, durent faire tourner bien des têtes...

S'il choisit d'y habiter, Edgard D'Hont refusera de reproduire sans cesse sa cité dont bien des ruelles aux allures de coron suintaient la misère. En cela, il se démarquera de l'oeuvre de son ami François Maréchal, plus enclin à représenter des coins de ville sans se soucier de leur aspect parfois crasseux et sordide. Chênée, à la fin du dix-neuvième siècle, a, peut-être sans réflexion, trop facilement accepté de céder ses bosquets fleuris et ses prairies à la goujaterie économique de bâtiments sidérurgiques peu soucieux d'élégance.

Une carte postale éditée par le "Secours d'Hiver" local nous propose cependant la reproduction d'une des oeuvres du paysagiste, datée de 1906, illustrant un coin peu amène du Vieux Chênée, à savoir la rue Vieille Jobette. Cette édition du vivant de l'artiste nous montre l'importance qu'occupe Edgard D'Hont dans la mémoire collective de sa commune. En fin de vie,volontiers hâbleur, il utilisera souvent la carte reproduite ci-contre afin d'envoyer de ses nouvelles à ses amis...surtout s'ils sont peintres eux-mêmes !

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Cette ruelle existe toujours. Elle permet de rejoindre , au départ du quai des Ardennes, la rue Vinâve, voie jadis principale, menant à Grivegnée. Mal entretenue, elle ne voit passer qu'un nombre infime de promeneurs avides de raccourci. La "Jobette", malgré sa tendre féminisation d'un terme professionnel des fondeurs reste un symbole de la souffrance ouvrière et en acquiert ainsi la valeur d'un souvenir à respecter.

A ses pieds coule encore un ruisseau résidu des nombreux bras de l'Ourthe d'avant la modification de cours précédant l'Exposition Universelle.du début de vingtième siècle. Les brasseries et savonneries qu'il longeait ont depuis longtemps disparus au profit d'un boulevard très fréquenté qui conduit directement au centre de la cité liégeoise.

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Par un dessin au fusain reproduit sur carton imprimé, Edgard D'Hont choisit de représenter le vieux pont de Chênée aujourd'hui disparu.

Long de quatorze mètres et fier de ses trois arches, sa construction fut imposée par l'empereur Napoléon premier qui fit utiliser en guise de main d'oeuvre des prisonniers de guerre espagnols. Les anciennes cartes postales ci-dessous nous démontrent la précision "diabolique" du trait du Maître de Chênée.

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( huile sur toile datée de 1913 intitulée" HEURE CALME" ( copyright BAL- Musée des Beaux-Arts de Liège ) 84,5cm sur 105cm ( cliché provisoire dans l'attente d'une épreuve professionnelle)

 

Le majestueux tableau intitulé "Heure calme" représente, sous le ciel pacifié d'une fin de journée, la villa GHEYSSEN qui abrite désormais des  bureaux administratifs de l'Intercommunale liégeoise des Eaux. Fait étrange, en 1727, la maison appartenait à un certain Desoer qui, porté par une âme de mécène et de visionnaire, tenta en vain de créer à Liège une première école de dessin. Bâti en bordure d'un bras de l'Ourthe, coincé entre différents biez et en aval de la cascade artificielle dite de la "grosse batte", le bâtiment était jadis cerné par les marécages. Son entrée s'ouvrait sur un célèbre passage d'eau, sa barque et son passeur.

En 1903, en prévision de l'imminente Exposition Universelle de Liège, cet environnement fut transfiguré suite à de gigantesques travaux qui virent l'assèchement des lieux et la canalisation de la rivière. L'ouvrage titanesque prit tellement de temps qu'il fallut repousser l'ouverture de la manifestation à l'été 1905, soit deux longues années plus tard.

L'Ourthe "recula" alors d'une trentaine de mètres offrant un tracé asséché à l'actuel Quai des Ardennes. Avant et suite à cet asservissement, l'Ourthe a attiré plusieurs paysagistes de talent. L'un d'eux, déjà aguerri se nomme José Wolff...C'est pourtant sur le travail d'Edgard D'Hont que la ville de Liège posa son choix en acquérant pour son musée d'art l'oeuvre présentée ci-dessus.

Il y a quelques années, le bâtiment, dans un souci sincère d'embellissement architectural, a subi quelques modifications ostentatoires. Ces ajouts eurent pour effet d'alourdir un ensemble simple mais solennel. Le caractère fruste d'une construction s'accommode parfois d'un génie asservi à la simplicité...Vouloir l'enrichir s'avère prendre un risque et porte atteinte à la grâce d'une impressionnante humilité.

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Les clichés ci-dessous nous présentent à gauche l'oeuvre de José Wolff datée de 1917 mais malheureusement privée ici de ses couleurs somptueuses . A droite est proposée la toile datée de 1916 d'un artiste nommé Lenaerts. Ces deux peintures d'excellente facture traduisent parfaitement l'impression de noblesse que dégageait ce lieu heureusement toujours visible de nos jours.

Il est à remarquer que les trois oeuvres présentées ici, bien que réalisées bien après les travaux de correction du cours de la rivière ont choisi de présenter les lieux avant ces modifications pratiques mais jugées par beaucoup à l'époque assez vandales...

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Situé à la sortie de Chênée le carrefour dit "THIER DES CRITCHIONS" sépare ses deux voies. Celle de droite mène à Embourg quant à celle de gauche elle conduit à Beaufays.

C'est cette dernière qu'a choisi de croquer Edgard D'Hont, réalisant ainsi l'esquisse d'un possible futur tableau

Dans le même carnet de croquis préparatoires, le paysagiste choisit de représenter, quelques années avant sa disparition, le bâtiment qu'il connaît sous la dénomination de: "Château Pirlot" Construit sur les ruines d'un petit château-fort bâti vers 1200, le château de BEAUFRAIPONT, tel que représenté sur la photo de droite fut construit en 1661 par un verrier liégeois du nom de BOUNAM. C'est en 1855 que Ferdinand PIRLOT, propriétaire des usines "Cuivre et Zinc" le réaménage pour l'occuper avec famille et descendants pendant plus d'un demi-siècle. Le bâtiment sera détruit en 1930 suite à l'extension des usines tournant alors à plein régime et réclamant toujours plus d'espace...La faillite de l'entreprise durant le XXème siècle ne ramena évidemment pas la réapparition du somptueux bâtiment qu'il nous aurait plu d'encore admirer de nos jours.

 

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La délicate aquarelle ci-dessus ne possède aucun titre et se voit uniquement notée au verso "L'Ourthe à Chênée".

Elle a été vendue en avril 2017 en la salle des "VENTES ELYSEE" à Chênée.

La photo ci-contre a été prise quasi à l'endroit précis où l'artiste s'est placé. Il s'agit de la passerelle surplombant l'Ourthe le long du paisible ravel qui longe l'agréable rivière prête à terminer sa course et à se mêler à la Vesdre avant de rejoindre la Meuse.

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La très belle toile ci-dessus, typique de l'oeuvre de l'artiste honoré dans ces pages, a pour titre : PAYSAGE, CHÊNEE. La toile mesure 45 cm sur 60.

Elle a été mise en vente en la maison Ventes Elysée en avril 2022. On y distingue le Chênée bucolique que le peintre appréciait tant et qu'il vit progressivement disparaître à son grand regret. Voyageons donc dans le temps en sa compagnie sous ces frondaisons chaleureuses...